Pour que ça roule mieux : les travailleurs et les travailleuses à temps partiel se mobilisent pour avoir des emplois meilleurs et plus stables

25 septembre 2015

Vous aurez de la difficulté à concilier le travail et les obligations familiales et autres si votre calendrier de travail peut être modifié au pied levé.

Or, le mois de juillet qui vient de s’écouler a contribué à l’amélioration du travail par roulement pour les travailleurs et les travailleuses du Canada et leurs familles.

Des milliers de personnes travaillant dans de grands magasins d’alimentation – où le calendrier de travail peut être imprévisible et il est difficile d’obtenir des heures équivalant à un emploi à temps plein – respirent un peu mieux depuis que leurs syndicats ont négocié des mesures rendant leurs calendriers de travail moins imprévisibles.

« J’arrive maintenant à planifier à l’avance », déclare Adriana Georgakopoulos, jeune employée du magasin Loblaws Superstore de Whitby, en Ontario. « La modification permet à tout le monde de se préparer à participer à des événements familiaux, à des rendez-vous chez le médecin ou à des cours. Le préavis sera fantastique pour moi, particulièrement aux fins de mes études. »

Adriana fait référence à de la nouvelle procédure de programmation du travail que son syndicat, la section locale 1000A des Travailleurs et travailleuses unis de l’alimentation et du commerce (TUAC), a établi par la négociation collective cet été. Adriana et plus de 12 000 autres personnes travaillant pour les magasins Loblaws Great Food et Superstore ont ratifié une convention collective améliorant l’établissement des calendriers de travail.

Les modifications comprennent un préavis plus long des calendriers de travail. Cela permet aux travailleurs et travailleuses de mieux organiser leur emploi du temps en fonction d’autres engagements, qu’il s’agisse d’études, d’obligations familiales ou même d’un second emploi.

Également en juillet, des membres d’Unifor ont ratifié une convention collective applicable au personnel de 28 magasins d’alimentation Metro de la région du Grand Toronto qui prévoit un préavis plus long des calendriers de travail et qui garantit un nombre minimal d’heures de travail.

C’est ainsi que les syndicats aident les personnes travaillant à temps partiel qui souhaitent améliorer non seulement leur propre situation mais aussi celle de leurs familles.

La programmation irrégulière du travail et l’augmentation du travail précaire

La programmation imprévisible du travail augmente dans le secteur de la restauration et du commerce de détail, ce qui contribue à l’augmentation du travail précaire au Canada. Les syndicats de tout le Canada se mobilisent non seulement pour répondre à l’appel du CTC à un Meilleur Choix mais aussi pour donner aux travailleurs et travailleuses les outils dont ils ont besoin pour mettre un terme à l’exploitation que constitue la programmation en question.

Qu’est-ce que la programmation imprévisible du travail et pourquoi pose t-elle un problème ?

La programmation imprévisible se présente sous différentes formes. Dans certains cas, les employés sont maintenus « en disponibilité » pour une certaine période mais il n’est pas garanti qu’ils soient rappelés au travail pour un quart. Dans d’autres cas, les quarts sont inscrits au calendrier mais l’employé doit appeler le jour du quart pour savoir s’il travaillera ou non. Dans d’autres cas encore, les employés reçoivent un calendrier mais celui-ci peut être modifié moyennant un préavis très court ou il comprend trop peu d’heures.

Quel que soit le cas, les travailleurs et les travailleuses ont énormément de difficulté, sur les plans financier et personnel, à faire face à la programmation imprévisible. Les personnes qui travaillent à temps partiel se voient souvent attribuer un nombre insuffisant d’heures de travail, et les calendriers imprévisibles les empêchent d’occuper un second emploi. De plus, la programmation imprévisible impose des obstacles aux personnes qui doivent concilier les études et le travail et aux parents qui doivent obtenir des services de garde à l’enfance.

Dans quelle mesure la programmation imprévisible est-elle répandue ?

La programmation imprévisible du travail est un élément du travail précaire au Canada.

Des emplois créés depuis six ans, près des trois quarts sont jugés précaires. Plus de 19 % des Canadiens et Canadiennes travaillent à temps partiel et près d’un million d’entre eux préféreraient travailler à temps plein. En Ontario, 63 % des personnes qui travaillent au salaire minimum doivent effectuer des quarts et des heures de travail qui changent d’une semaine à l’autre. « Autrement dit, les heures imprévisibles sont la norme pour la plupart des personnes qui travaillent actuellement au salaire minimum en Ontario », selon le Centre canadien de politiques alternatives (en anglais).

La combinaison de l’augmentation du travail précaire et du taux de chômage élevé du Canada, particulièrement dans le cas des jeunes, a facilité l’exploitation des sans-emploi par les entreprises qui engagent un trop grand nombre de personnes et ne les font travailler qu’à temps partiel ou sur demande.

Que disent les détaillants ?

Certaines entreprises prétendent que la programmation du travail « flexible » réduit leurs frais de main-d’œuvre en leur permettant de hausser ou de réduire rapidement les niveaux de dotation en fonction des besoins. D’autres soutiennent que la programmation imprévisible risque de nuire aux résultats nets de l’entreprise car elle accroît le taux de roulement du personnel et fait baisser le moral de celui-ci et la productivité.

Aux États-Unis, des travailleurs et travailleuses se sont mobilisés (en anglais) pour faire des pressions politiques sur les détaillants au sujet des quarts sur demande. Cela a encouragé bon nombre de grandes entreprises, y compris Abercrombie & Fitch, Victoria’s Secret et The Gap, à s’engager à éliminer peu à peu les quarts sur demande (en anglais).

Ce que font les syndicats

Les lois provinciales et fédérales n’assurent que peu de protection de la prévisibilité des calendriers de travail. C’est pour cela que les syndicats négocient des mesures s’ajoutant aux dispositions actuelles de la législation. Les exemples donnés par Unifor et TUAC cet été sont les illustrations les plus récentes de l’aide apportée par les syndicats aux travailleurs et travailleuses qui veulent améliorer leur situation.

Les gouvernements doivent mettre les lois à jour pour rectifier la situation

Parce que les travailleurs et les travailleuses se sont mobilisés, certaines provinces ont commencé à réviser leurs lois sur le travail à la lumière des tendances des milieux de travail. Par exemple, l’Ontario a entrepris un examen de l’évolution des milieux de travail qui consiste à réviser la Loi sur les relations de travail et la Loi sur les normes d’emploi dans le contexte des nouvelles tendances des milieux de travail, y compris les suivantes :
•    La hausse des relations de travail non conventionnelles comme les emplois temporaires, les emplois à temps partiel imposé et le travail autonome;
•    La croissance du secteur des services;
•    La mondialisation et la libéralisation des échanges;
•    L’accélération des changements technologiques;
•    Une plus grande diversité dans les milieux de travail.

Il reste tellement à faire

Le mouvement syndical a participé à ces consultations publiques et il espère qu’elles permettront de régler les problèmes des travailleurs et travailleuses vulnérables.

Or, il ne suffit pas que les provinces donnent le pas. La population canadienne a besoin de gouvernements de tous les ordres qui suivent l’exemple des États-Unis et manifestent une volonté politique.

Il est tout aussi important que le Canada ait un gouvernement fédéral qui défend les travailleurs et les travailleuses, qui agisse de manière proactive en établissant une stratégie nationale sur l’emploi en fonction de la réalité de l’évolution des milieux de travail et qui garantisse à tous les Canadiens et les Canadiennes un avenir de meilleurs emplois.