Le 9 mai 1992, à peine huit mois après l’ouverture de la mine de charbon Westray avec l’aide des gouvernements fédéral et provincial, une explosion de méthane tue 26 mineurs travaillant sous terre.
Une enquête officielle menée par suite du désastre conclut « la stupidité et la négligence » de la part des propriétaires, mais toutes les tentatives de poursuivre l’entreprise et ses dirigeants ont échoué. Il a fallu 11 ans pour enfin changer la loi et rendre les employeurs criminellement responsables lorsque des travailleurs sont tués.
Tôt le matin sous la petite ville de Plymouth, en Nouvelle-Écosse, le méthane s’échappant dans le puits de la mine Westray à partir du gisement de charbon Foord mêlé à la poussière de charbon cause une explosion. Le ciel s’embrase soudainement d’une intense lumière bleue et les habitations à plus d’un kilomètre de distance sont secouées par le souffle de l’explosion. En quelques secondes, 26 mineurs de service sous terre à ce moment-là meurent.
À peine plus d’une heure plus tard, une équipe d’hommes descend à pied dans la mine pour tenter un sauvetage. Peu après, des équipes de sauvetage des mines de l’île du Cap-Breton, de Pugwash et de Bathurst se joignent à elle car la tradition veut que les mineurs s’empressent de tenter de venir en aide à leurs collègues. Mais personne n’a survécu à l’explosion.
Au moment de l’explosion, la mine Westray était la seule mine de charbon souterraine exploitée dans le district houiller du comté de Pictou, en Nouvelle-Écosse. Ce gisement était exploité depuis 200 ans, et de nombreuses explosions s’étaient déjà produites. La mine Allan, située à proximité et fermée en 1951, avait subi huit explosions de méthane en 40 ans.
Le nombre des victimes de l’explosion de la mine Westray en faisait le pire désastre minier depuis l’explosion survenue à la mine de charbon de Springhill qui avait enlevé la vie à 75 mineurs. L’extraction du charbon a toujours été dangereuse. De 1838 à 1950, 246 mineurs du comté de Pictou avaient perdu la vie par suite d’explosions semblables de méthane et de poussière de charbon. Bon nombre d’entre eux exploitaient le gisement Foord dans lequel se trouvait la mine Westray. De 1866 à 1972, 330 autres mineurs sont morts par suite d’autres accidents miniers. Selon le Bureau de la statistique du travail du ministère du Travail des États-Unis, les décès attribuables au travail sont six fois plus fréquents dans l’industrie du charbon que dans toute autre industrie privée du globe.
Malgré ces dangers, il s’avère que la mine Westray était un accident qui devait arriver. Avant que la mine Westray n’ouvre ses portes, des craintes avaient été exprimées au sujet de sa sécurité. Pendant sa construction, en juillet 1991, le député provincial Bertin Boudreau envoie une lettre au ministre du Travail de la province pour lui signaler que la nouvelle mine de charbon « risque d’être l’une des plus dangereuses du monde ». La promesse de nouveaux emplois, de profits faramineux et de récompenses politiques a supplanté ces avertissements et d’autres.
Une enquête provinciale menée par le juge Peter Richard par suite du désastre conclut que « l’histoire de la Westray est une complexe mosaïque d’actions, d’omissions, d’erreurs, d’incompétence, d’apathie, de cynisme, de stupidité et de négligence ». (The Westray Story: A Predictable Path to Disaster.) Pourtant, toutes les tentatives afin de poursuivre l’entreprise et ses dirigeants pour les actions qui ont mené à la mort de 26 hommes ont échoué.
Les syndicats du Canada ont réagi en lançant une campagne pour amender le Code criminel du Canada afin de pouvoir tenir criminellement responsables les directeurs et gestionnaires des entreprises qui ne prennent pas les mesures nécessaires pour protéger la vie de leurs employés en cas de décès en milieu de travail. Des projets de loi déposés par des députés ne sont pas adoptés, mais au cinquième essai, en 2003, le gouvernement fédéral adopte la loi que l’on viendra à connaître sous le nom de « loi Westray » qui pose un nouveau cadre de responsabilité des entreprises au Canada.
Les installations de la mine Westray sont rasées en 1998, et le puits de la mine est scellé, ensevelissant les dépouilles de 11 mineurs. Un mémorial est aménagé dans un parc près de New Glasgow à peu près au-dessus de l’endroit où étaient emprisonnés les mineurs non retrouvés. Les noms et les âges des 26 hommes morts sont gravés sur le monument central avec l’inscription « Leur lumière toujours brillera ». Les terres sur lesquelles se trouve le mémorial sont protégées par le gouvernement de la Nouvelle Écosse et toute nouvelle exploration minérale est interdite dans le parc.