Le racisme existe-t-il au Canada? Oui, et à l’état endémique. Il nous faut un gouvernement qui s’engage à l’éradiquer
Le 24 février, la juge québécoise Eliana Marengo a déclaré à une jeune femme musulmane nommée Rania El-Alloul qu’elle n’entendrait son cas qu’à condition que la jeune femme enlève son foulard.
À l’occasion de la Journée internationale pour l’élimination du racisme de l’Organisation des Nations Unies (ONU) célébrée le 21 mars, nos pensées iront vers Rania El-Alloul et d’autres membres de la communauté musulmane au Canada victimes de discrimination dans leur vie quotidienne.
Nous nous rappellerons également comment le racisme systémique a plongé les femmes et les filles autochtones dans une grande pauvreté, caractérisée par l’insuffisance de logements sûrs, l’absence d’opportunités économiques et l’accès limité à la justice.
Nous nous souviendrons que le 6 mars, le Comité des Nations Unies pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes (CEDEF) a conclu que l’incapacité chronique du Canada à agir face à la violence extrême contre les femmes et les filles autochtones constituait une « grave violation » de leurs droits humains.
Nous nous souviendrons que les hommes noirs vivant à Toronto sont trois fois plus susceptibles d’être arrêtés pour vérification d’identité par la police. Nous nous souviendrons également qu’environ 40 % des employeurs sont plus susceptibles d’accorder une entrevue à une personne à la recherche d’un emploi qui porte un nom à consonance anglaise.
Que faisons-nous pour aider à éradiquer le racisme?
- Le mouvement syndical apporte son soutien aux communautés victimes de discrimination. Ainsi, après les événements du 9/11, nous avons travaillé avec les communautés musulmanes pour lutter contre l’islamophobie généralisée.
- Nous condamnons le racisme lorsqu’il se produit, par exemple lorsque le gouvernement cible des travailleuses et des travailleurs migrants pour les expulser, lorsque des jeunes autochtones ou des jeunes racialisés sont abattus par les forces de police ou lorsque le racisme est la raison derrière un refus de logement.
- Nous négocions des clauses contre la discrimination et le harcèlement dans les conventions collectives pour veiller à ce que les pratiques d’embauche soient équitables et que les milieux de travail soient exempts de discrimination.
- Nous travaillons avec les gouvernements à tous les niveaux pour renforcer les lois régissant l’équité d’emploi.
- Nous éduquons pour lutter contre le racisme, nous formons nos dirigeantes et dirigeants et les membres à répondre au harcèlement ainsi qu’au racisme individuel et systémique.
- Le gouvernement doit agir davantage pour aider à éliminer le racisme.
Le CTC appelle le gouvernement fédéral à prendre acte de la réalité du racisme au Canada aujourd’hui, en reconnaissant son propre rôle dans le maintien et la promotion de la discrimination systémique et flagrante. Le gouvernement peut agir concrètement pour éradiquer le racisme tant systémique que flagrant de trois façons :
Le Comité de l’ONU pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes s’est associé à l’appel lancé par les femmes autochtones et les Canadiens et Canadiennes à travers le pays demandant la tenue d’une enquête publique sur les meurtres et les disparitions de femmes autochtones. Il est temps que le gouvernement y prête attention.
Le gouvernement doit cesser de jouer avec la rhétorique et de répandre la peur en prenant pour cibles la communauté musulmane et d’autres communautés racialisées. L’utilisation de termes tels que « djihadistes » et « Islam radical » est irresponsable et sème la haine. Cela doit cesser.
Le gouvernement doit respecter ses obligations internationales et rendre des comptes au Comité des Nations Unies pour l’élimination de la discrimination raciale (CEDR). Le Canada n’a jamais respecté son obligation de rendre des comptes à ce comité.
interpeller les candidates et candidats aux prochaines élections fédérales.
Lorsque les candidates et candidats vous demanderont de voter pour eux lors des prochaines élections, demandez-leur leur opinion sur le racisme au Canada et s’ils acceptent de s’engager à mettre en œuvre ces trois premières étapes pour permettre d’éliminer le racisme dans le pays.
Dans les mois précédant les élections, le mouvement syndical demandera à l’ensemble des partis politiques d’expliquer en détail ce qu’ils comptent entreprendre pour éliminer la discrimination systémique et la discrimination raciale dont sont victimes les communautés autochtones et les communautés racialisées au Canada.
Quelques chiffres sur le racisme au Canada aujourd’hui :
- 50 % des enfants des Premières nations vivent dans la pauvreté, contre 17 % du reste de la population canadienne.
- Le salaire moyen des travailleuses et travailleurs autochtones est de 19 000 $ contre 33 000 $ pour le reste de la population canadienne active.
- Le taux de mortalité infantile est une fois et demie plus élevé dans les communautés des Premières Nations que dans le reste de la population.
- L’espérance moyenne de vie des femmes et des hommes autochtones est inférieure de cinq et neuf ans à celle des autres Canadiennes et Canadiens.
- Les hommes noirs vivant à Toronto sont trois fois plus susceptibles d’être arrêtés pour vérification d’identité par la police.
- 1 401 crimes haineux ont eu lieu au Canada en 2010.
- Environ 40 % des employeurs sont plus susceptibles d’accorder une entrevue à une personne à la recherche d’un emploi dont le nom est à consonance anglaise qu’à d’autres personnes dont le niveau d’éducation, de compétences et d’expérience est identique.
En 2011, le taux de chômage des travailleuses et travailleurs appartenant à une minorité visible était de 9,9 % contre 7,3 % pour les travailleuses et travailleurs non racialisés.
Les Canadiennes et Canadiens racialisés gagnent également en moyenne 19 % de moins que les autres.
55 % des Canadiennes et Canadiens sont convaincus que la discrimination raciale dans le pays est chose du passé.