Le gouvernement doit bloquer le Partenariat transpacifique
Jeudi, Hassan Yussuff, président du Congrès du travail du Canada (CTC), et Angella MacEwen, économiste principale du CTC, se sont adressés au Comité permanent du commerce international de la Chambre des communes afin de faire part de leurs sérieuses préoccupations concernant le Partenariat transpacifique (PTP) négocié par les conservateurs. Ci-dessous se trouve la déclaration de Hassan Yussuff au Comité. Pour en savoir plus sur le PTP et réclamer avec nous son annulation, visitez bloquonsleptp.ca.
Présentation du Congrès du travail du Canada au Comité permanent du commerce international, de la Chambre des communes, au sujet des consultations publiques sur le PTP le 16 juin 2016.
Au nom des 3,3 millions de membres du Congrès du travail du Canada, nous tenons à vous remercier de nous donner l’occasion de présenter notre point de vue sur les répercussions qu’aurait l’accord du Partenariat transpacifique (PTP).
Je tiens d’abord à vous remercier sincèrement ainsi que le ministre Freeland et votre gouvernement d’avoir consenti à engager un dialogue ouvert et franc au sujet du Partenariat transpacifique (PTP) négocié par le gouvernement précédent.
Cet accord présente de graves lacunes, et nous croyons que le coût du PTP dépasse de beaucoup les avantages restreints qu’il pourrait peut-être présenter.
Les partisans de l’accord ne s’attendent qu’à ce qu’il accroisse d’environ 0,5 % le PIB du Canada, et ce dans dix ans.
Cela revient à peu près au montant que le gouvernement précédent a promis de verser à l’industrie laitière en dédommagement des pertes qu’elle subirait par suite du PTP.
Cela ne laisse rien pour compenser les pertes que subiraient l’industrie de l’automobile et d’autres secteurs.
Une importante étude de l’Université Tufts prévoit que les travailleurs et les travailleuses des 12 pays participant au PTP y perdraient parce que le PTP accroîtrait l’inégalité des revenus.
L’accord très imparfait vise à défendre les droits des multinationales. Il n’aide nullement les travailleuses et les travailleurs, ni l’environnement.
Les deux secteurs qui ont le plus à perdre sont l’industrie de l’automobile et l’industrie laitière.
Cependant, je tiens à vous présenter également nos inquiétudes relatives à la prestation des services publics, la hausse des prix des médicaments et la contestation de la réglementation environnementale par les investisseurs.
L’industrie de l’automobile
L’industrie de l’automobile est d’une importance cruciale pour la recherche et le développement du Canada, la production à forte valeur ajoutée et les exportations du secteur manufacturier.
En 2014, environ 40 000 personnes travaillaient dans l’industrie de la construction de véhicules automobiles.
Et 70 000 autres travaillaient à la production de pièces d’automobiles.
Une élimination échelonnée sur cinq ans des tarifs douaniers sur les importations de véhicules automobiles japonais découragerait rapidement la fabrication d’automobiles au Canada.
Et elle encouragerait les assembleurs de voitures japonaises à importer des véhicules.
Unifor estime que le PTP pourrait causer la perte de 20 000 emplois dans la seule industrie de l’automobile.
L’industrie laitière
L’industrie laitière canadienne fournit des aliments de qualité élevée produits localement et fait vivre de petites fermes familiales et collectivités rurales.
Le PTP permettrait aux producteurs laitiers étrangers de faire main basse sur 3,25 % de plus de la production laitière canadienne en 2016.
Cela se produirait en des temps où l’industrie laitière subit déjà des pressions considérables.
Le Canada risquerait de perdre un marché de 250 millions de litres de lait par année et les emplois de production qui y sont associés.
Règlement des différends entre investisseurs et États
Le modèle de règlement des différends entre investisseurs et États nous inspire de nombreuses craintes.
Les problèmes que pose ce modèle sont désormais bien connus :
- la non-reddition de comptes et le caractère ad hoc des groupes arbitraux;
- la définition large de ce qui constitue un investissement
- le fait que les groupes en question ne relèvent pas des systèmes judiciaires nationaux mais se situent plutôt au-dessus d’eux
- le fait qu’on semble faire fi des prérogatives des gouvernements et même de la jurisprudence nationale à tout sujet.
Services publics
Le chapitre du PTP qui porte sur les services publics exige le maintien du niveau actuel de privatisation grâce à des clauses de « cliquet » et de « maintien du statu quo ».
Cela rend plus difficile que les gouvernements créent de nouveaux services publics, tels que l’assurance-médicaments ou un programme de services de garde à l’enfance, sans que cela ne fasse l’objet d’une demande de règlement de différend entre un investisseur et un État.
Le Canada se classe déjà au deuxième rang mondial pour ce qui est des dépenses en médicaments par habitant.
Le PTP restreindra encore davantage les efforts faits pour réformer l’achat et la prestation de médicaments sur ordonnance au Canada.
Environnement
De plus, le PTP comprend de vastes interdictions des exigences applicables au rendement économique ou environnemental…comme par exemple l’exigence d’un transfert de technologie ou de l’approvisionnement local pour favoriser l’industrie verte.
Ces restrictions décourageront les gouvernements qui prévoient prendre les mesures nécessaires à un virage vers une économie générant peu d’émissions de carbone et résistant aux changements climatiques.
Il est temps de rétablir des formes plus raisonnables de protection des investisseurs.
Les protections devraient être assujetties aux systèmes judiciaires nationaux, privilégier le règlement des différends entre les États et accorder autant d’importance aux responsabilités des investisseurs qu’à la protection de leurs actifs.
Conclusion
Nous avons incité le gouvernement fédéral à procéder à sa propre analyse des effets du PTP.
Et à en rendre les résultats publics.
En terminant, je tiens à demander au comité s’il a commandé une analyse exhaustive à Affaires mondiales Canada.
Et s’il ne l’a pas fait, je tiens à lui recommander de le faire.
Compte tenu des très importants enjeux économiques et politiques, la population canadienne mérite rien de moins qu’un débat de fond exhaustif sur les conséquences que peut avoir l’accord proposé.